Les Meilleurs Épisodes de Télévison de 2011 [EDIT]

Cette année aura vu prédominer la sitcom, et malgré ce que le New York Times affirme, l’âge d’or de la série télé n’est pas tout à fait fini, et ces 15 exemples (que je vous invite fortement à découvrir… en cliquant où il faut) suffisent à le prouver.

Mention honorable :
How I Met Your Mother – Bad News

How I Met Your Mother n’est plus une bonne série. Ça ne l’empêche pas d’être l’une des séries les plus constantes et donc des plus constamment drôle à la télé, mais aujourd’hui, la sitcom est un truc sympa à regarder quand il n’y a pas grand chose d’autre à foutre. La faute à un network de vieux, qui persiste à diffuser des sitcoms à l’ancienne, avec caméras multiples, décors de soap et rires du public enregistrés.

Au milieu de la saison 1, quelque chose s’est passé pour cette série qui ne brillait pas particulièrement par son originalité, son exécution (à y regarder de près, les acteurs étaient loin d’exceller dans le pilote, où tout semblait répété et faux) et sa prémisse, qui renouait davantage avec le miel et le sirop de Friends qu’avec l’audace de Seinfeld ou la satire de The Office. How I Met’ est peu à peu devenu un phénomène populaire, à mesure que les personnages ont gagné en épaisseur et en personnalité, et que le concept a commencé à payer – avant qu’il ne finisse par se retourner contre ses auteurs. On peut imaginer à quoi la série aurait ressemblé si elle n’avait pas été sur CBS, mais sur FX ou NBC, ou encore sur Fox, où peut-être, flashs-back, idées et détours auraient alors fait naitre de nouveaux délires plutôt que de diluer l’intrigue et mettre la patience des fans à rude épreuve.

Mais voilà, la série est sur CBS, et sa popularité – un poil injustifiée au regard de consœurs 1000 fois plus innovantes – vient aussi de là. La chaîne est regardée par des millions d’américains qui sont les spectateurs types, qui s’installent devant une série pour se détendre plutôt que pour être stimulés intellectuellement. Et dans le cas de ce genre de série, et pour parodier Yoda, la popularité amène à la prudence, la prudence mène au conformisme, le conformisme, à la nullité. La plupart des gens préfèrent un truc familier à quelque chose de trop original, et sont rassurés de retrouver d’une série à l’autre des similitudes plutôt que de trop grandes différences stylistiques ou thématiques, c’est ce qui explique le succès de Big Bang Theory (ça et le fait que les gens confondent blagues de nerds et vannes sur les nerds.)
C’est la force de l’habitude. La soudaine popularité de How I Met Your Mother a fait le buzz, et amené un plus grand nombre de gens à la découvrir, qui allaient s’entendre sur sa qualité d’écriture et son ensemble de personnages, pour ensuite ressortir les catch phrases de Barney Stinson. Dans le cas analogue d’un Bref, ce n’est pas le fait que la série soit populaire qui pose problème. Car pour l’un comme pour l’autre, entendons-nous bien, c’est mérité. Le programme court de Canal peut continuer longtemps, même après que notre héros ait enfin baisé “cette fille”, comme bien des sitcoms, tel qu’on peut l’imaginer (hélas) pour The Office, et comme ce fut le cas pour Friends. Mais Bref peut aussi s’arrêter à ce moment là parce qu’il en aura été décidé ainsi, comme The Wire ou Breaking Bad. HIMYM a quant à elle, comme Dexter ou Sons of Anarchy cette année, préjugé de son succès pour s’offrir des saisons superflues, celui-ci empêchant les auteurs de prendre les décisions qui s’imposent – dégager leur personnage principal comme l’ont fait Boardwalk Empire ou Game of Thrones par exemple – mais surtout de prendre des risques, ou simplement d’en finir avec une intrigue qui aujourd’hui est devenue piteusement secondaire, accessoire, mais à qui la série doit pourtant son titre.

Toutefois, la saison 6 aura pourtant oser traiter de la mort, celle du père de Marshall, dans un épisode brillant aussi bien qu’émouvant, toujours juste sans pour autant s’affranchir d’idées ou d’humour en dépit de sa forme obsolète, tel ce compte à rebours qui s’achève sur un moment vrai et poignant (à défaut d’être incroyablement évocateur, parce que les acteurs sont limités, et la caméra paresseuse) qui fait montre du talent tout de même indéniable de Carter Bays et Craig Thomas, mais aussi d’une certaine prise de risque (enfin) : ou comment transformer une demi-heure de comédie en une semaine de déprime.

15. Southland – Graduation Day

Addendum. Si j’ai sciemment décidé d’écarter 30 Rock (qu’il me tarde de retrouver jeudi prochain), South Park ou même Platane et d’éliminer d’office Bref ou l’animation nippone, j’y ai au moins songé, et fais des choix. Je ne me pardonne pas en revanche d’avoir zappé la série de TNT, parce qu’elle mérite très largement de figurer en lieu et place de l’épisode de How I Met Your Mother, que j’avais déjà inclus un peu à contrecœur.

Comme son nom l’indique (et pour ceux qui suivent la série), “Graduation Day” marque la fin de l’entrainement de l’officier Ben Sherman (époustouflant Ben McKenzie) et la fin d’une saison qui aura encore une fois – et même davantage – entrepris de jouer avec les nerfs et nouer les gorges, avec son lot de scènes d’action superbement rythmées, de conclusions chargées en émotion, mais aussi, de la disparition de l’un des protagonistes. Southland est une série qui s’est toujours efforcée de rendre le quotidien policier avec un réalisme documentaire saisissant, que ce soit dans la forme, avec sa caméra embarquée qui fait presque figure de personnage, ou sur le fond, parce qu’en dépit de sa galerie de personnages très “écrite”, des histoires les plus tragiques aux anecdotes les plus drôles, en passant par les enquêtes les plus sordides, tout sonne vrai. A l’image de ce final. Si l’on considère uniquement la course-poursuite de Ben sur les toits, on pourrait s’arrêter à la qualité de la mise en scène, tout bonnement impressionnante, mais elle donne à voir, d’un point de vue dramatique, d’une part la pugnacité du caractère de Ben – qui pense d’abord pouvoir arrêter un type et le menotter et finit par devoir l’affronter pour sauver sa peau – et d’autre part l’impuissance de John Cooper, son partenaire, et son impardonnable erreur de jugement. Car au delà de la scène elle-même, pourtant si stupéfiante, c’est là que se situe véritablement le nœud de l’intrigue, concluant ainsi impeccablement cette saison magistrale. L’épisode s’ouvrait en annonçant un drame sur le point d’arriver, et s’achève avec l’espoir que les changements, les décisions qui résultent de cette saison, ne mentiront pas dans celle à venir.

14. The Good Wife – Getting Off

Ou le choc de voir un personnage indémontable se désintégrer sous nos yeux…

13. Happy Endings – Spooky Endings
 
 
 

Si depuis que Happy Endings existe beaucoup la compare à Friends, l’exécution, cette façon de boucler in fine chaque intrigue tient davantage de Seinfeld. L’épisode spécial Halloween en est un parfait exemple, divisant notre bande de potes pour mieux faire régner une ambiance faussement cauchemardesque. Brad et Jane font du “house-sitting” pour un couple d’amis dans la banlieue chic de Chicago, faisant face à une horde de gamins treat or trickers, ce qui n’est pas sans rappeler l’épisode de Seinfeld où Jerry et Elaine sont coincés dans un fête de banlieue avec un Michael Chicklis un poil relou. Quant aux quatre autres, déguisés pour une fête dans une boîte, leur calvaire est, par son aspect inextricable, proprement seinfeldien. Penny et Max partagent un costume de maman et bébé pas pratique quand les deux veulent choper, et Dave voit Alex, son ex-fiancée, malade, draguer un type qui la prend pour un transsexuel, à cause de sa voix rauque et quelques phrases malencontreuses. Entre Max et ses extraordinaires mini-bras en plastique, Jane qui parvient à garder toute sa contenance dans son costume, l’abattage d’Elisha Cuthbert en mode vamp à côté de la plaque ou celui de Damon Wayans Jr. en mode ultra sérieux, entre gags slapstick et humour décalé, la comédie d’ABC, à l’image de ce “Spooky Endings”, est ainsi parvenue à dépasser le concept de la bande de potes super beaux pour faire de la comédie infiniment généreuse et généreusement efficace.

12. It’s Always Sunny In Philadelphia – CharDee MacDennis, Game of Games

La septième saison de la série trash de FX ferait presque figure d’anomalie, tant il est rare de trouver un série qui parvient, après deux saisons un peu en berne (en dépit de l’excellent “Charlie Kelly : King of the Rats”) à retrouver le feu sacré, et signer des épisodes aussi fantastiques que celui-ci. La série, après trois premières saisons formidables, s’est retrouvée dans une situation analogue à 30 Rock et, en cherchant à se surpasser au prix de son identité et de son réalisme, s’est éloigné de la satire, la dénonce de nos sales habitudes, de nos petites hypocrisies pour tomber dans le délire un peu trop échevelé. La force de It’s Always Sunny In Philadelphia est toujours venue de la relation toxique de ces personnages, proche de celle des quatre protagonistes de Seinfeld, et qui fait des émules (Workaholics). Et ici, cette force est exploitée au max’.

Nos cinq oisifs décident de tromper leur ennui un lundi en ressortant un vieux jeu de leur invention (jusqu’ici inconnu pour nous), le ‘CharDee MacDennis’ que Charlie définit comme “une guerre, et pas juste un jeu”. Et si Friends et HIMYM nous l’ont prouvé, respectivement avec “The One With The Embryos” et “Game Night”, l’idée a toujours donné de bons épisodes. Paradoxalement, je pense qu’il est à la fois une parfaite entrée pour ceux qui ne connaissent pas la série et l’épisode culte qui ravit les fans de la première heure, parce que contrairement au deux séries suscitées, ici il n’est pas nécessaire de connaitre quoi que ce soit pour apprécier le spectacle abjecte de cinq connards utilisant un jeu pour faire ce qu’ils font pourtant très bien d’habitude, se mettre une mine et s’humilier les uns les autres. Mais le jeu en lui-même est superbe de stupidité, avec ses trois niveaux de difficulté et ses épreuves mentales associées au vin (répondre à des questions de trivia non-sensiques) physiques associées à la bière (lancer de fléchettes dans la main) et “spirituelles” associées aux alcools forts (se faire enfermer dans une niche). Mais même si la prémisse est simple, l’épisode est une merveille de rythme, d’écriture, et de jeu, passant sans cesse de frénétiques, hystériques perches, à de mauvaises et nauséeuses descentes.

11. Homeland – The Weekend

Homeland a terminé sa première saison sur un final paroxystique, étouffant et épuisant, tout en laissant énormément de choses en suspens pour la saison 2. Mais en tant qu’épisode charnière de la série, “The Weekend” est le plus riche en émotion – pour une série autrement très aride de ce point de vue malgré la focalisation sur l’intime et le privé. Carrie Mathison surveille donc pas très légalement l’homme qu’elle soupçonne d’être un terroriste, un marine passé à l’ennemi, Nicholas Brody, pour le compte de la CIA et de la sécurité de son pays, mais aussi pour prendre une revanche personnelle sur l’impasse du 11 Septembre. Avant que ce septième épisode ne commence, Carrie a déjà couché avec Brody (une autre façon de le dire serait : elle s’est bien fait baisée), et on se demande pour le compte de qui. Est-ce pour sa mission, ou par fascination, par séduction ? “The Weekend” est à la fois une parenthèse enchantée pour les deux amants, et leur relation, jusqu’ici emprunte de jeu, de secret et de doute, apparait presque comme une évidence. A l’instant où pour la première fois, comme blague Brody, ils font l’amour à jeun, une réelle connexion nait entre ces deux êtres fragiles et instables, pour aussitôt cesser d’exister, lorsque les secrets sont dévoilés, et que l’interrogatoire commence. A la fin de l’épisode, il ne reste plus rien de l’attraction autrefois éprouvée, tout est fini, foutu, éteint. Juste foutrement brillant.

10. The League – Bobum Man

“Bobum Man” est un épisode dont la nature humoristique est très compliqué à décrire si l’on est pas un minimum familier avec l’univers testostéroneux de The League, qui n’est définitivement pas pour tout le monde, à l’image de ce concept d’ogre du cul, un personnage inventé par Pete lors de leurs années de fac, pour terrifier son pote Kevin au téléphone. C’est décidément ce qui fait le sel de cette série certes graveleuse mais aussi complétement cinglée, prendre une idée aussi absurde qu’abstraite, et riffer dessus pendant une vingtaine de minutes, tout en construisant une intrigue et un vrai nœud dramatique, en l’occurrence autour du sexanniversaire de Jenny et Kevin. L’épisode brille aussi par le ‘my face’ de Taco, et comment son invention donne naissance à un bobum man réel incarné par Raffi le taré, tout cela s’entrelaçant parfaitement pour arriver à un dénouement tout aussi délirant, où André est comme d’hab’ le dindon de la farce. Encore maintenant, il m’est impossible de prononcer “Bobum Man” sans éclater de rire. Tout seul. Comme un con.

9. Boardwalk Empire – To The Lost

“Under God’s Power She Flourishes”, l’avant-dernier épisode de cette solide seconde saison du drama criminel de Terence Winter, nous avait livré les secrets de sa relation incestueuse et castratrice avec sa mère Gillian, mais aussi annoncé la cassure du personnage de Jimmy Darmody, la mort d’Angela n’étant que le reflet de l’impossible reconstruction de leur union, et le meurtre du Commodore la résolution de son œdipe. Et après avoir trahi Nucky, et failli, le personnage n’avait plus rien à accomplir, plus rien à espérer. Jimmy n’était pas vraiment en vie, il est mort dans les tranchées avec des millions de ses frères d’armes, à qui il n’oubliait jamais de porter un toast : “to the lost.” Le fan de Cowboy Bebop que je suis ne peut s’empêcher de penser au personnage de Spike, avec qui Jimmy partage plus d’un trait de personnalité. Cette attitude désincarnée et téméraire transpirait dans chacun de ses actes. Lorsqu’il tirait dans la tête d’un homme sans montrer le moindre signe d’humanité, ou pendant l’épisode chicagolais, lorsqu’il s’attachait à une prostituée défigurée. Enfin dans son parcours contre Nucky. Jimmy n’a avec le recul jamais semblé impliqué. “You can’t be half a gangster.” La phrase qu’il livrait à Nucky dans le pilote, et que ce dernier n’aura que trop bien enregistrée, résonne littéralement lors de la scène finale. Nucky a fait le deuil de son humanité, et depuis longtemps fait celui de son ancien protégé. Jimmy savait, empêchant Richard de le suivre, et si nous savions nous aussi, nous espérions voir la rédemption de Jimmy. To the balls (of the writers)!

8. Louie – Oh Louie/Tickets

Louie est une série plutôt drôle, mais il serait injuste de la qualifier de sitcom, le ton étant rarement hilare, mais plus incisif, provocateur, mais aussi très personnel et teinté de beaucoup de mélancolie, de gravité. La série sert davantage de support aux performances et aux digressions de CK, et en ce sens, tiens presque plus de l’œuvre d’art que de la vulgaire série télé. Et dans le paysage audiovisuel, un peu de prétention ne fait parfois pas de mal, surtout si c’est bien fait, ce qui est le cas vous l’aurez compris. Beaucoup d’épisodes pourraient se trouver dans cette liste, comme par exemple l’ambitieux “Duckling”, auquel j’avais d’abord pensé, dans lequel Louie s’envole en Afghanistan (en réalité le désert californien) et qui raconte le périple de l’humoriste avec l’USO dans un épisode spécial d’une heure. Mais c’est “Oh Louie/Tickets” qui est véritablement le plus marquant. Louie s’applique à définir les limites de la création humoristique, et le rapport entre célébrité et intégrité pour les artistes de stand-up. Le véritable morceau de bravoure de l’épisode, et qui a beaucoup fait parler, se déroule dans une loge du Madison Square Garden, où Dane Cook reçoit Louie et échangent et confrontent leur biff. L’épisode est scripté, mais la scène est absolument prodigieuse du simple fait que tout ce qui s’y déroule est réel, puisque Dane Cook a réellement été accusé d’avoir plagié CK. L’échange est hypnotique, la tension est palpable et pourtant ce qui est dit oscille entre le ridicule, le profond et le comique. Une claque.

7. Archer – Placebo Effect

D’un certain point de vue, l’épisode précédent “Placebo Effect”, “Stage Two”, est peut-être le meilleur de la saison, avec ses dialogues et sa façon de traiter de façon très méchante, un peu glauque, et néanmoins amusante, du cancer, avec cette sorte de légèreté frivole, ce ton de la parodie décalée, entre hommage sérieux et usage de clichés qui est un peu la signature de la série. On lui préférera toutefois sa suite directe, dans laquelle on retrouve quelques uns de ces éléments, et qui réussit là où la série échoue souvent, en nouant la petite histoire de Ruth par le biais de mélancoliques flash backs, pendant que notre héros Sterling Archer se lance à la poursuite des enfoirés qui lui ont vendu des médocs fabriqués à partir de Zima et de sucrettes. “RAMPAGE!”

Krieger: You didn’t think it was weird your chemo drugs were chewable?
Archer: No! Little kids get cancer.
Krieger: Awww, they do

L’épisode est représentatif de tout ce qui qualifie Archer comme la meilleure série d’animation du moment. Sa jubilatoire surenchère, servie par une qualité plastique sans équivalent et l’imagination folle de son créateur Adam Reed, aussi bien que dans sa culture de la référence obscure, et surtout dans sa science du rythme, combinant avec génie le surplace dérivatif à la montée de pression trépidante, en passant par la grossièreté régressive. L’épisode passe donc du massacre graphique ultra-sanglant, à l’interrogatoire de trois mafieux à la mode de la Famille En Or, où Archer se prend pour Patrick Roy et explose les rotules des candidats à chaque mauvaise réponse (soit dit en passant la scène la plus drôle de l’année), le tout en alignant l’air de rien une intrigue secondaire sur les origines suspectes de Krieger, pour clore cet épisode fulgurant et jouissif sur un hommage presque plan par plan d’un épisode de Magnum. Énorme.

6. Parks & Recreation – The Fight

Je crois que tout est dit. [à synchroniser avec le “Goodbye Horses” de Q Lazzarus]

Parks & Rec’ possède probablement le meilleur ensemble, et à travers eux, le groupe de personnages le plus solide actuellement à la télévision. Cela tient mine de rien de la gageure lorsqu’une sitcom parvient ainsi à mettre en place une intrigue sans perdre de vue ses personnages, en les incluant parfaitement dans la mécanique dramatique, sans foutre en l’air l’histoire. Beaucoup d’épisodes de la troisième et quatrième saisons sont géniaux, “Harvest Festival”, “Road Trip”, “Pawnee Rangers” et bien sur “Ron & Tammys”. Il s’agit donc presque d’un choix arbitraire et subjectif, du fait de la constance de cette série, et le soin que les auteurs apportent aux protagonistes, ainsi qu’aux personnages secondaires. “The Fight” est celui que j’ai choisi, car si le délire est toujours emprunt d’intimisme dans Parks & Recreation – les efforts ratés de Tom pour lancer sa marque d’alcool (Snake Juice!), annonciateurs de ses envies entrepreneuriales, et surtout l’engueulade entre Leslie et Ann – l’ambiance est surtout tourné vers la comédie.

Ici, en plus d’être traités par le spectacle de toute la bande complétement défoncée, nous sommes comblés par la présence de Nick Kroll dans le rôle du Douche, un animateur radio dégueulasse, mais surtout par le personnage de Jean-Ralphio, le flamboyant, l’insupportable, l’irrésistible Jean-Ralphio. “Remedial…” est peut-être le plus ambitieux, mais “The Fight” est sans conteste l’épisode de sitcom le plus drôle de l’année. Un comble si l’on pense à la relative médiocrité d’une première saison, heureusement rattrapée par une seconde saison excellente, et une troisième qui l’est encore plus, comptant “Flu Season” et son Rob Lowe malade se répétant face à un miroir le désormais cultissime «Stop. Pooping!»; pour clore avec “Lil’ Sebastian” et son ode à un petit cheval mort, en passant par cette nuit d’ivresse où les liens d’amitié se rescellent, où nos héros se la collent sévère, et où Ron Swanson danse avec un ‘tiny hat’ sur la tête. Tout est juste… Parfait.

5. Games Of Thrones – Baelor

Que vous connaissiez ou non l’issue de cet avant-dernier épisode, il est impossible de nier son impact émotionnel et dramatique. Horrible décapitation nonchalante mise à part, l’épisode vaut aussi pour le développement de l’intrigue, aussi bien du côté des plaines Dothraki, que sur le champ de bataille où s’affrontent Tyrion et Robb, ou encore dans la capture du Kingslayer. Mais c’est véritablement cet acte final qui témoigne le mieux de la réussite de cette adaptation, de la qualité de la reconstitution de cet univers fantasmagorique pas si éloigné du notre – il fut un temps – et qui achève de nous surprendre, même quand on s’y attend, et de nous émouvoir, même lorsque aucune autre fin n’aurait de sens. They killed my nigga Ned. Indeed.

4. Community – Remedial Chaos Theory

Tout comme pour Parks & Rec’, c’est chaud de ne choisir qu’un seul épisode dans ce qui restera la sitcom la plus ambitieuse, la plus hautement conceptuelle depuis Arrested Development. Harmon a passé deux saisons et demi à tester la résistance de notre groupe d’étude, explorant les personnages, leur relation les uns aux autres, et, par la mise en abime, à étudier leur dynamique sous le scope de la série télé. Ceci tout en n’oubliant pas de les caractériser, de les faire évoluer (ou pas) pour arriver à un échantillon de personnalités contradictoires ou prévisibles, capables de surprendre ou susceptibles de décevoir. Si j’avais choisi le “Paradigms of Human Memory” (saison 2 – novembre 2010) l’exemple aurait été parfait, puisque aucune autre série ne peut se permettre de faire un faux-épisode compilatoire inventé de toute pièce, en se passant d’intrigue, et d’y infuser de larges doses de références. “Remedial Chaos Theory” est un de ces épisodes à concept devenue la marque de fabrique de la série.

C’est parce que Community ose ce genre de chose qu’elle se situe tellement au dessus de toutes les autres, n’en déplaise à ceux qui ne le comprennent pas, ou qui n’ont simplement pas accroché et qui pensent que leur subjectivité, leur sensibilité, ont valeurs d’argument. Et comme pour donner raison aux fans de la consensuelle et proprette Modern Family, de l’inepte Big Bang Theory ou de la de facto dépassée How I Met Your Mother, Community a entamé sa troisième saison de façon chaotique, avec des épisodes qui ne fonctionnaient pas tout à fait, voire pas du tout. Mais c’est justement parce qu’elle prend des risques que la série est amenée à se casser parfois un peu la gueule. Et après ces trois premiers épisodes où la magie semblait avoir disparue, déboule non seulement le meilleur épisode de la série, mais un concept tenant du génie : comment le groupe fonctionnerait-il si l’un d’entre eux disparaissait ? “Remedial Chaos Theory” est l’un des plus drôles, des plus couillus, et des plus intelligents épisodes de télévision en 2011, mettant en place des blagues sophistiquées pour obtenir une chute fracassante des scènes plus tard, caressant l’intelligence de ses spectateurs au lieu de l’insulter. Et ce, et c’est aussi pour cela que cet épisode est si déterminant, en n’oubliant jamais l’aspect sentimental, comme n’importe quelle bonne sitcom, mais à la Community, c’est-à-dire dans une posture d’interaction avec le spectateur, où celui-ci plutôt que d’être servi directement dans le bec, se pose des questions, qu’il s’agisse de la (im)possible relation de Jeff et Annie, ou de la perte d’un des protagonistes. C’est aussi, ironie suprême, un épisode qui a complétement revitalisé la série pour le reste de la saison, ce qui est d’autant plus terrible vis-à-vis de son hiatus et hypothétique annulation. Et si Arrested Development m’a appris quelque chose, hélas, c’est de ne pas compter sur la jugeote ovine du spectateur américain… Reste plus qu’à croiser les doigts et espérer son retour en Septembre 2012.

3. Friday Night Lights – Always

The Wire se terminait sur une image de Baltimore, aussi foutue qu’au départ, The Sopranos se terminait avec un homme, un milieu inchangés, quant à Lost… Le final de Friday Night Lights se termine de la façon dont un immense drama télé est censé se terminer : en bouclant la boucle, en coupant les liens et achevant les arcs de chaque personnage, et ce, sans prétention ou pied de nez, mais par amour pour ses fans, qui le lui rendent bien. En écrivant ces lignes, mes doigts sont fébriles, et mes yeux embués, réminiscence de mon état à la fin de “Always”, ou pour changer, mes kleenex essuyaient des larmes. Je ne sais pas si Friday Night Lights marche parce que les ficelles fonctionnent sur moi, ou si réellement la série possède suffisamment de qualités intrinsèques pour atteindre même le dernier des cyniques. Peut-être parce que cette peinture, portée par des acteurs tous plus extraordinaires les uns que les autres, d’une équipe de football dans le Texas rural, où le sport est pris très au sérieux, mais pour qui au final il reste une commodité pour une Amérique en crise, malgré ce qu’il peut apporter à chacun, dit simplement (naïvement peut-être) que, passé le superbe émanant d’une victoire, vivre sa vie, suivre sa voix, est encore plus difficile que de gagner un match. Il ne fait pas oublier que nos héros, en dépit de ce qu’ils ont pu affronter ensemble ou chacun de leur côté, à l’instar de Tim Riggins, méritaient bien un happy end. “Clear Eyes, Full Heart, Can’t Lose.

2. Justified – Brother’s Keeper

Lorsqu’on parle de série, le finale est souvent considéré comme le plus important. Les personnages et leurs histoires s’entrechoquent enfin, concluant une intrigue sentimentale, résolvant le mystère d’une saison, ou ouvrant sur la suivante en terminant sur un cliffhanger. “Brother’s Keeper” n’est pas le finale de cette fantastique deuxième saison, et pourtant il laisse l’impression à la fois d’une fin et d’un commencement – une fin qui sera illustrée dans le tonitruant “Bloody Harlan”. Au cours de sa deuxième saison, Justified aura dévoilé plus encore l’univers sombre et moite, et parfaitement singulier de Harlan, et présenté une nouvelle espèce de sa faune criminelle : la famille Bennett. Sa terrifiante matriarche Mags et ses fils Dickie et Coover, ainsi que la jeune Loretta McCready viennent se joindre au noyau déjà dur formé par notre héros Raylan Givens, “ses” femmes Ava et Winona, et surtout Boyd Crowder. A l’image de la lutte de ce dernier pour rester sur le droit chemin, et son inéluctable échec, “Brother’s Keeper” nous montre les personnages révéler de concert leur véritables objectifs, Mags passant un marché avec Black Pike, Boyd dévoilant ses plans et Loretta réalisant ce qui est réellement arrivé à son père, et ce, dans un extraordinaire crescendo télévisuel, entrecoupé de moments d’une poésie toute rurale, où Margo Martindale chante du bluegrass et Walton Goggins danse la gigue, culminant enfin quand quelqu’un se fait “descendre” – toujours une excellente chose soit dit en passant. L’épisode entier est tendu comme une corde de banjo, impeccablement écrit et superbement joué, entre le glauque reptilien de Jeremy Davies, la terreur ultra-réaliste de Kaitlyn Dever, la détermination froide de Timothy Olyphant et surtout, surtout, la chute vertigineuse et fulgurante de Margo Martindale, de l’état de grâce, à la rage rentrée et le pathétique, tout est grandiose, et badass comme c’est pas permis.

1. Breaking Bad – Crawl Space

Breaking Bad est, avec Mad Men, le meilleur dramatique télé du moment. Du fait du hiatus insoutenable du dernier, le premier a donc dominé par son excellence cette année 2011. Breaking Bad n’est pas, contrairement à Dexter ou Psych, le genre de série que l’ont prend un plaisir ludique à voir, à retrouver chaque semaine, mais plutôt celle que l’on redoute, dont on retarde la vision, pour mieux y plonger avec la délectation du spectateur masochiste. La série est ainsi devenue l’archétype du “slow burn” où les auteurs prennent le temps de construire, et par la même de calfeutrer (si l’on me pardonne cette métaphore maçonne) pour étouffer le spectateur, et les personnages. Breaking Bad, c’est entendu depuis la première saison, parle de la lente, difficile et quelque part rigoureuse et méthodique descente d’un homme dans les dédales de la folie, et dans son Enfer personnel. Ce qui au départ a commencé sous les faux airs de l’infecte Weeds, s’est peu à peu transformé en métamorphose d’une personne jusqu’ici morale et saine d’esprit forcée de se corrompre pour survivre, en l’affirmation d’un égo surdimensionné afin d’exister dans l’univers criminel. La saison 4 nous montre ainsi, et toujours de manière méticuleuse, chaque étape des différents plans fomentés par les plus calculateurs, ainsi que chaque réaction, chaque nuance, des plus émotifs face aux pires situations. Hormis le final, qui aurait pu figurer ici, de même que chaque épisode de cette implacable saison, “Crawl Space” est révélateur de l’incomparable maitrise de la série, qu’il s’agisse de son esthétique (image d’en-tête) qui témoigne de la qualité de la mise en scène, stylisée et pertinente, ou son intrigue, pas complètement originale, mais rehaussée par une écriture exemplaire servie par une interprétation phénoménale.

La scène dans le désert capture parfaitement mes propos, avec cette immensité bleue et ocre écrasant littéralement notre héros, ou plutôt antihéros, à genoux face à un Gus qui a prouvé qu’il ne fallait pas le sous-estimer, après la confrontation vengeresse avec le Cartel, et qui démontre une fois de plus sa cruauté et son génie criminel, ayant devancé chacun des pauvres stratagèmes de Walt, et manipulé Jesse de but en blanc. Bryan Cranston est juste incroyable dans cette scène, passant du pathétique au superbe, du bouffon au flippant, et cela sans perdre une seule seconde ce qui définit Walt : la peur. Renvoyant à ce lent travelling ascendant (image ci-dessus) enfermant Walt en plein ‘nervous breakdown’ dans le cercueil qu’il s’est lui-même fabriqué, avec pour seul compagnon, le reste du fric que sa vénale et manipulatrice compagne lui a laissé.

10 thoughts on “Les Meilleurs Épisodes de Télévison de 2011 [EDIT]”

  1. C’est d’la merde, Patrick Puydebat n’est même pas mentionné pour sa performance dans le mystère de l’amour.

  2. Bien gros. Très intéressant.
    Quid des séries françaises ? Y’a certes moyen d’être bcp moins loquace mais tout de même je rejoins l’avis de l’internaute ci dessus. Anglade dans “Braquo” ? Sallette dans “Les revenants” ? Thierry Redler dans “les filles d’à côté” ? Faudrait monter un top ten.

    1. Cet article est dédié aux meilleurs épisodes de 2011, donc pas de Braquo. Et bien que Sallette m’a fait supporter Les Revenants je peux pas en toute conscience foutre un seul épisode de cette série atrocement surestimée dans cette liste, n’en déplaise à Télérama. J’aurais inclus Engrenages sans effort dans la liste de 2012, mais la série est si tristement laconique dans son mode de production que j’ai toujours un train de retard…

  3. Fair enough. quid d’un classement des meilleurs acteurs de séries françaises sérieux ? je serai curieuse de lire ça !
    Et c’est vrai que “Les revenants” n’est pas une série de ouf mais bon vaut mieux ça que (d’s’en foutre) “joséphine ange gardien”, et Sallette dans la série est classe.

    1. Ouais mais on connait tous ce classement :
      Victor Lanoux
      Gérard Klein
      Aladin Reibel
      Igor Butler
      Adama Ouédraogo
      Patrick Puydebat
      Philippe Vasseur
      Thierry Redler
      Gérard Vives

      BOOM!

  4. J’admets ne pas encore réussir à réfléchir en 2 dimensions. C est vrai qu’j’ai du mal…

  5. Pat Puydebat et Phil Vasseur direk’ (ils vont de pair par cont’, sinon le duo marche ap)
    Igor Butler, bien évidemment
    ouais Gérard Klein, j’avoue
    Le prof de philo roux dans 2de B
    Laly Meignan
    Framboisier (ou René)
    Madame Bellefeuille (gros travail de construction de personnage)
    M. Girard
    Giant Coucou
    Mouss Diouf

    1. J’ai déjà nommé Aladin Reibel.

      Je raise donc avec Suzy et Suzon, Annette, Ilguegue, Adel, Frank et Philippe, et le cast entier de Plus Belle La Vie. Bim, how d’you like them apples?!

      1. J’suis plus trop d’accord là!
        Annette a la rigueur, ‘ais pas Suzon et Suzette, ni le crew de + belle la life. NON.
        On a trop déconné. on s’est focalisé sur AB productions, on en a oublié Jean Dujardin!

      2. Ok, ok, c’est vrai que les courts M6, Bruno Sodo et Yvan LaBaloch’ ont été négligés au profit d’AB, mais tu ne me convaincs qu’à moitié. Christine et Stephanie Ever, tout comme François Rocquelin, Anthony Dupray ou Christophe RIPpert ont marqué l’histoire de la télévision française. Et j’en oublie, quid des Roméo Sarfati, Bénédicte Delmas et autre Tonya Kinzinger, des Linda Lacoste, des Malaury Nataf, des Astrid Veillon, Emma Colberti et Frank Neel (je suis presque sérieux, je surkiffais Jamais Deux Sans Toi…t), des Sophie Mounicot, des Laurent Laffite, des Vanessa Demouy, et des Cachou, en veux-tu en voilà.

Leave a reply to Enna Peran Cancel reply